Interview spéciale de Blanche Carelle Njoussi, Miss Albinos Cameroun 2022
Si elle vous saisit par sa beauté, vous serez rendu captif de son intelligence et de sa vivacité d'esprit. Blanche Carelle Njoussi fait partie de ces miss engagées, soutenant avec ferveur une cause qu'elle estime légitime.
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- • Blanche, quel a été ton ressenti lorsque tu as été couronnée Miss Albinos du Cameroun 2022 ?
- • Comment tes proches, notamment tes parents et tes frères, ont-ils accueilli ce changement ?
- • Quel est ton projet en tant que Miss Albinos du Cameroun ?
- • Où en es-tu avec la réalisation de ce projet ?
- • Et actuellement, en quoi te fais-tu former ?
- • Puisque tu es encore au niveau de la rédaction de ton projet, penses-tu avoir assez de temps puisque ton mandant de Miss prendra fin en juin de cette année ?
- • Quels sont les moyens qui ont été mis à disposition pour que tu puisses mener à bien ce projet ?
- • Qu'est-ce que votre couronnement en tant que Miss Albinos du Cameroun t'a apporté comme plus-value dans ta vie quotidienne ?
- • Blanche Carelle, pour toi qui portes aujourd'hui la couronne de Miss Albinos Cameroun et qui a participé à plusieurs concours de beauté, une Miss peut-elle vivre de ses revenus de Miss ou doit-elle avoir des revenus parallèles ?
- • Blanche Carelle Njoussi est-elle un cœur à prendre ?
- • Quels sont tes projets pour la suite ?
Blanche Carelle Njoussi voit le jour le 3 avril 1998 dans la ville de Bafoussam. Elle y fait la première partie de sa vie ainsi que ses études primaires et secondaires. Elle entame le secondaire au Collège évangélique de Bafoussam avant de rejoindre les bancs du Lycée bilingue de la même ville. Après l’obtention d’un baccalauréat D, sciences de la vie et de la Terre, obtenu en 2016, elle prend son envol pour l’inconnu et migre vers la capitale politique : Yaoundé. Mais changer d’environnement n’est pas du tout chose facile.
Arrivée à Yaoundé, c’est une pléthore d’écueils qui se dressent devant la jeune dame. Elle s’inscrit en première année de biologie animale à l’Université de Yaoundé l (Ngwa-ekele), mais ne s’y sent pas à l’aise. Faisant régulièrement face à des piques en raison de son albinisme, Blanche Carelle Njoussi décide de changer d’établissement.
Elle opte cette fois pour un institut privé d’enseignement supérieur où elle se réoriente vers le marketing. En parallèle, la jeune femme travaille comme secrétaire dans une entreprise spécialisée dans le bâtiment et les travaux publics. Malheureusement, elle change une nouvelle fois de ville suite à ses activités et ne compose pas son BTS.
Avant son installation dans la ville de Douala, Blanche Carelle Njoussi s’intéresse au monde de la mode. Elle enchaîne alors avec les concours de beauté comme Miss Orangina, Miss Seme Beach, Miss Nations Unies, Miss Fenac (Festival National des Arts et de la Culture) et bien d’autres, mais elle ne remporte pas de couronne. Téméraire et déterminée, elle ne baisse pas les bras. Elle est convaincue qu’il y a, pour elle aussi, une couronne de Miss qui l’attend quelque part.
Autrefois timide, sa participation aux concours de beauté lui a permis de gagner en assurance et en éloquence. En 2022, en parcourant son fil d’actualité, elle remarque une fiche d’annonce pour un concours de beauté réservé aux personnes albinos. Elle décide alors de se lancer dans cette aventure qui lui permettra de dégoter enfin sa couronne. Le 11 juin 2022, Blanche Carelle Njoussi est donc élue Miss Albinos du Cameroun. Et elle nous a fait l’honneur d’accepter notre interview. Écoutez-la.
Blanche, quel a été ton ressenti lorsque tu as été couronnée Miss Albinos du Cameroun 2022 ?
J’étais fière. Mais en même temps, je me suis dis « Ouh la! Ce sera chaud« . Parce qu’être Miss ne tourne pas juste autour des strass et paillettes comme on peut s’imaginer, mieux encore Miss Albinos, c’est être ambassadrice, c’est-à-dire défendre la cause de toutes les personnes atteintes d’albinisme au Cameroun. Autrement dit, il y a une obligation à représenter cette minorité comme il se devrait.
Il faut parler de l’albinisme aux gens, parce qu’en 2022-2023, il y a encore des personnes qui ont des préjugés à ce sujet. Et avec nos réalités africaines, il faudrait expliquer cela aux populations afin qu’elles sachent réellement de quoi il s’agit et que ce ne soit plus un sujet mystifié. En parallèle, il faut aussi discuter avec les personnes atteintes d’albinisme pour qu’elles ne se sentent plus en marge de la société.
Comment tes proches, notamment tes parents et tes frères, ont-ils accueilli ce changement ?
Il est vrai que je suis quelque peu devenue la petite star de la famille. À la maison, mes proches ont remplacé mon prénom par mon titre de Miss. À partir de ça, je peux dire que ma famille m’est d’un grand soutien.
Mes sœurs, par exemple, me posent régulièrement des questions pour savoir à quel niveau je suis avec mon projet, de quelle manière je compte l’implémenter… Et elles vont même jusqu’à me demander si elles peuvent m’apporter une quelconque aide.
Jusqu’ici, j’ai reçu beaucoup de soutien, d’encouragements de la part de ma famille. Et je vous assure que c’est très réconfortant de savoir que je peux compter sur eux.
Quel est ton projet en tant que Miss Albinos du Cameroun ?
Chaque édition de l’élection Miss et Master Albinos Cameroun a un thème. Par exemple, en 2022, le thème était : « Ensemble, brisons les barrières d’ignorance sur l’albinisme« . M’inspirant de ce thème, mon projet s’est porté sur l’amélioration des conditions de vie des personnes atteintes d’albinisme au Cameroun.
Il est question, ici, de former les personnes albinos afin de les rendre autonomes dans la société. Pas seulement au niveau professionnel, mais qu’elles soient libres des jugements et des regards de travers. En d’autres termes, il s’agit de mettre sur pied un centre d’incubation, de coaching, pour les apprendre à vaincre la timidité due au fait de leur différence. Ainsi, les albinos gagneraient en développement personnel. C’est vraiment un projet qui a pour but d’aider les albinos à se sentir intégrer dans la société.
Où en es-tu avec la réalisation de ce projet ?
J’ai déjà commencé à rédiger le projet, mais je ne l’ai pas encore implémenté. Pour le moment, je me suis limitée à agir au niveau de la sensibilisation à l’albinisme, avec mes passages à des chaînes de télé et de radio, je suis aussi adepte des réseaux sociaux.
Du coup, au fur et à mesure que je mène mes activités, je rencontre des personnes qui s’intéressent à mon projet et qui veulent apporter leurs pierres à l’édifice. On se rend compte en réalité que les conditions de vie évoluent avec le temps, tout comme les mentalités. Ce qui fait que de nos jours, les personnes atteintes d’albinisme commencent peu à peu à s’assumer et à se sentir à l’aise en société, bien que le chemin soit encore long.
En gros, pour le moment, je me limite à ma formation et à la sensibilisation, afin d’apprendre aux autres comment s’assumer pleinement en tant que personne albinos.
Et actuellement, en quoi te fais-tu former ?
Étant donné que j’avais d’abord commencé par le marketing à ISMIBCG, que je trouvais d’ailleurs assez facile, j’ai voulu me confronter à un autre challenge. J’ai donc changé de filière et je me suis inscrite en gestion, logistique et transports. En ce moment, je suis en deuxième année de BTS à l’Institut Supérieure de Sciences et de management.
Puisque tu es encore au niveau de la rédaction de ton projet, penses-tu avoir assez de temps puisque ton mandant de Miss prendra fin en juin de cette année ?
Bien évidemment. C’est juste le mandat de Miss Albinos Cameroun et les avantages qui l’accompagnent qui sont limités à un an. Cependant, je suis Miss Albinos Cameroun 2022 à vie. Ainsi, j’ai tout le temps pour bien implémenter mon projet.
Quels sont les moyens qui ont été mis à disposition pour que tu puisses mener à bien ce projet ?
Je dirais le réseautage. J’ai fait partie de la cohorte 20 YALI (Young African Leaders Initiative). J’ai été formée à Dakar, donc je fais déjà partie de ce réseau. En plus de cela, je fais partie des jeunes volontaires de l’Union Africaine. Du coup, le titre de Miss m’a encore permis de gagner en visibilité.
Au fur et à mesure que le temps passe, j’acquiers de nouvelles compétences et j’ai de nouvelles idées pour pouvoir matérialiser mon projet. Ces personnes m’apportent également des idées pour pouvoir mener à bien mes actions. Mais je pense entamer les prémices de mon centre d’incubation au lendemain de ma remise de couronne, le 10 juin 2023.
Qu’est-ce que votre couronnement en tant que Miss Albinos du Cameroun t’a apporté comme plus-value dans ta vie quotidienne ?
Mon titre de Miss Albinos m’a permis de savoir que je pouvais inspirer d’autres personnes à faire comme moi, que je pouvais m’ériger en tant que modèle pour certaines filles. Savoir qu’une jeune fille albinos pourra me regarder et dire : « oh ! Je voudrais être comme elle demain« . Voilà ce que m’a apporté ce titre.
C’est pour cette raison que je mets un accent particulier sur mes formations. J’aimerais être une femme de référence, une personnalité intelligemment influente et surtout un modèle pour les jeunes ! J’aimerais que celles et ceux qui ont du mal à se sentir à l’aise en société, à assumer leur albinisme puissent prendre exemple sur moi et briser les barrières sociales.
Blanche Carelle, pour toi qui portes aujourd’hui la couronne de Miss Albinos Cameroun et qui a participé à plusieurs concours de beauté, une Miss peut-elle vivre de ses revenus de Miss ou doit-elle avoir des revenus parallèles ?
Dans le contexte de notre pays, ce n’est pas du tout évident. Si une Miss veut se limiter aux faveurs qu’elle reçoit, ce sera vraiment limité. Pour ma part, avant d’être Miss, j’avais et j’ai toujours mes activités en parallèle, notamment mon petit commerce.
Cependant, ma casquette de Miss m’a donné de la visibilité. Et j’utilise donc cette notoriété i pour me faire de la publicité et écouler mes stocks. J’ai d’ailleurs ouvert une boutique, LUNIK Universe Cosmétique, située au quartier Fouda.
Blanche Carelle Njoussi est-elle un cœur à prendre ?
Oui et non. Je suis un cœur à prendre dans la mesure où je n’ai actuellement personne dans ma vie. Parce que je ne pense pas être prête pour une relation puisque la conjoncture ne me permet pas d’avoir du temps pour cela. Entre les études, les associations, les activités de Miss, la famille, je n’ai pas le temps pour entretenir une relation.
Quels sont tes projets pour la suite ?
Par rapport aux albinos du Cameroun, et même d’autres pays, puisque je suis déjà en relation avec certains du Mali, de la Guinée, de l’Afrique du Sud et même du Togo, j’envisage de mettre sur pied un réseau. C’est différent d’une association.
La particularité de ce projet sera de mettre en relation les Albinos de plusieurs pays, pour en faire une force qui pourra accompagner et communiquer sur les activités. Il faut savoir que le réseautage, c’est la clé de beaucoup de réussite. Lorsque vous vous sentez portés par votre communauté, vous pouvez défier beaucoup d’obstacles qui se dressent sur votre chemin ; l’union fait la force.
Personnellement, j’ai pour projet de mettre un accent particulier sur mes formations, afin de pouvoir aller le plus loin possible. J’espère faire carrière dans la douane, mais je reste flexible dans d’autres domaines de la logistique.
À propos de l'auteur, Yvan Styve Guintang Ngoué
Diplômé d'une licence en sciences politiques, je suis passionné par les métiers de la communication. Un amoureux des mots qui essaie de les manier avec le plus grand respect et toujours un soupçon de sophistication.